Il est un thé qui me rappellera toujours mon arrivée en Chine, et mon premier choc culturel dans une maison de thé.
Parti en Chine quelques semaines avant le reste de la famille au tout début de notre expatriation et avec une seule valise, je n'ai même pas eu la place d'y ajouter un gaiwan et quelques feuilles de thé. La premère étape pour survivre, le soir même de mon arrivée fut évidemment de rentrer dans une petite échoppe de thé de quartier pour acheter un gaiwan pas cher, un gong dao bei (pot de réserve) et une tasse, ainsi que le graal : un des pires Wulong Da Hong Pao que j’ai jamais bu… Mais sans parler le Chinois, c’était déjà un exploit dans le quartier populaire où je logeais alors.
La seconde étape se déroula lors de ma première semaine de travail en Chine. Autour de moi dans l’open-space, un bon tiers de mes collègues avait une théière, un gaiwan ou juste une tasse à infuser sur le bureau, avec des points d’eau chaude et quelques bouilloires disponibles. Je décidais donc d’aller acheter rapidement un gaiwan discret pour pouvoir me faire du thé au travail sans me faire trop remarquer (ils s’habitueront plus tard à mes théières, mes boites de thés, mes galettes qui trainaient au milieu de mes piles de dossier…)
Le lendemain de mon arrivée, je profitais de la pause de midi, pour découvrir une petite maison de thé qui venait d'ouvrir, au décor assez zen, bien loin du bouiboui au fond d’un Lilong du premier jour, bien plus accueillant pour un européen perdu dans la jungle du Shanghai populaire. J'y trouvais un gaiwan facile en verre pas cher (je n’avais pas encore recu mon premier salaire et devais vivre quelques semaines sur les renminbi que j’avais échangés en France). On me proposait un thé, leur premier prix de LongJing: un Laowai (un étranger) complètement perdu, ne pouvait espérer mieux.
J'ai fait le tour de la boutique, espérant trouver mieux, mais avec les quelques idéogrammes à ma disposition, je ne pouvais me raccrocher qu’à un seul thé: 水仙 Shui Xian…
J'ai réussi à me faire comprendre tant bien que mal et je suis reparti avec 250g de thé déjà emballé dans un pochon en kraft et mon gaiwan pour ma seconde demi-journée de travail...
En ouvrant le pochon, quelle surprise!, dans le sachet 25 mini-briques de thé préemballées dans un sachet plastique et un papier. Rien de ce que à quoi je m’attendais… Ce fut ma première rencontre avec les Zhang Ping Shui Xian.
Il y a 6 ans en France, personne n’en avait jamais entendu parler. Même en Chine, presque personne ne connaissait ce thé… et c’est un tort. C’est une petite merveille de douceur fleurie et crémeuse au premier abord. Puis les feuilles s’ouvrent et la brique se défait, on se laisse alors submerger par la puissance de ce thé, par sa rondeur et sa longueur. On est dans l’univers des Wulong, mais on ne peut se raccrocher à quelque chose de connu. Ni un Tieguanyin ou un Dancong, Ni un Yancha, encore moins un Taiwanais... Fleuris et crémeux,rond et long en bouche, et tout en puissance... un vrai OVNI…
Une curiosité, une rareté… Et personne pour me dire ce que c’était… Il faut bien comprendre que personne ne connaissais ce thé en Chine, et ne pouvais me confirmer que j’avais bien acheté un Shui Xian (je ne connaissais alors les Shui Xian qu’à travers leurs versions en Dancong et en Yancha)…
Finalement j’en ai gardé un, et j’ai appris à lire les caractères chinois. J’ai retrouvé le producteur. Aujourd’hui, je connais trois producteurs dans le comté de Longyan où l'on produit les Zhang Ping Shui Xian. Et chacun propose un thé au caractère bien différent.
Cette année, pour l’ouverture de la boutique, nous vous proposons ce premier Zhang Ping Shui Xian, cette rareté originelle et qui a précédé toutes nos autres découvertes en Chine…
Arnaud
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